• 1921

    Le 12 décembre 1921,

    Cher Journal,

    L'année 1921 devait bien commencer. Elle nous promettait des naissances à venir et je dois bien te l'écrire, la perspective d'agrandir la famille me rends des plus heureux. Nous attentions le bébé d'Apolline, de Victorine et de Justine avec impatience.

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    Mais un matin de Janvier, alors que je m'apprêtais à commencer le travail de la ferme, je vis au loin quelque chose d'étrange. En m'approchant, je remarquais que c'était une silhouette, une petite silhouette. Un enfant surement. Plus près, je devinais que l'enfant était une fille. Une gamine assise... là. A attendre. Arrivé à sa hauteur, la môme m'a regardé et comme si elle avait apprit un texte, elle a ajouté:

    " Je suis votre petite-fille. Fille de votre regretté fils Honoré Jr. Si vous me gardez, vous pourrez revivre avec lui à travers moi. Je n'ai plus de maman, je n'ai plus de papa ... je suis seule. Aimez moi ... "

    La gamine devais avoir sept ou huit ans ... Quel malheur. Une fois de plus, j'aurais préféré que Junior s'éteigne sans descendance. Ou du moins sans ... celle-ci. Qu'allais-je faire d'elle ? Sans répondre, je repars à l'intérieur prévenir le reste de la maisonnée. La gosse m'a suivit en courant, et en m'agrippant la main. Mon cher journal, je sais que j'ai une fois de plus surement tord mais je ne peux m'empêcher d'écrire que j'ai ressenti comme un dégoût en tenant la main de l'enfant. Jamais je ne la verrais comme ma petite fille, c'est certain.

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    Une fois à l'intérieur, après avoir proposé à l'enfant de manger un peu, nous discutions d'elle. Evidemment, Georges et moi pensions la même chose: Elle est un fardeau. Pourtant nous nous sommes disputés. Bien que pas prêt à l'aimer, je pensais que nous pouvions tout de même la garder près de nous ... en mémoire de mon fils et surtout de ma pauvre Phélomène. Si elle avait été là, cette gamine aurait été la prunelle de ses yeux, la fille de son fils tant aimé. George était plus catégorique, on devait la déposer à l'orphelinat. Le ton montait peu à peu et Justine nous a fait remarqué que l'enfant était là. Nous avons invité la môme à quitter la pièce. Une fois la gosse parti, George a tapé du point sur la table et à dit son désaccord catégorique et définitif à l'idée de garder la petite avec nous. Augustine ne disait pas un mot, elle n'avait cesser de contempler la fillette pendant qu'elle grignotait son repas. Puis soudain, alors que la conversation s'envenimer avec George, elle a dit d'une voix posée:

    " Faisons un compromis ... Ne la mettons pas à l'orphelinat par mémoire à maman et son père. Gardons la le temps de lui trouver un foyer qui saura l'aimer malgré sa différence ... " 

    George s'est levé, a froncé les sourcils puis a répondu qu'il acceptait la petite jusqu'à la fin de l'été. Au delà de ce délais, il la déposerai lui même dans l'institution. Moi j'étais d'accord ... Supporter la gamine durant quelques mois ne me paraît pas insurmontable ... Ainsi, je n'aurai pas honte de me rendre sur la tombe de Phélomène et de Junior ... la gosse sera entre de bonnes mains. D'ailleurs, elle s'est rendu sur la tombe de son père ... Elle n'y a pas bougé de la matinée.

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    La nouvelle concernant la nouvelle arrivée s'est vite répandue. Je dois bien te l'écrire, j'en suis pas fier. Quel honte pour moi, tu ne peux pas savoir. Bref. Evidemment, ma fille Honorine est venue voir l'enfant. Elle est la seule qui se souvient réellement de Honoré jr, et ne pas l'avoir revu à son retour l'a tourmenté. Elle a tenu à voir la petite fille. Et nous nous sommes disputés. Elle n'a pas compris le compromis. Elle pensait que nous devions la garder. Que de l'envoyer dans une famille inconnue serait un risque de rendre l'enfant plus malheureux que jamais. Que nous ne la reverrons peut-être jamais...  Je lui ai proposé alors de la prendre. D'un regard noir, elle m'a répondu qu'elle n'avait pas les moyens de prendre une enfant en plus ... qu'étant veuve, c'est déjà assez difficile comme ça. Puis la môme nous a rejoins. Honorine avait les larmes aux yeux, elle s'est baissé puis la prise dans ses bras. "Excuse-moi petite, tu trouveras une gentille famille, un jour" ont été ses seuls mots. Honorine est partie sans se retourner ... Je ne l'ai pas revu pendant plus de trois mois mais cela s'est arrangé.

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    Puis les naissances tant attendues sont arrivées. Cela a redonné un peu de gaieté dans la maison. Ainsi le 22 janvier est né Léon, le troisième enfant de Victorine et Arthur. Trois jours plus tard, le 25 janvier, est né Eugène. Eugène De Lahaute. Mon nom est doublement sauf, je suis le grand-père le plus heureux. Justine a été aidé par Adelaïde. Celle ci est maintenant plus disponible ... son dernier né François est désormais un beau jeune homme de treize ans. Puis un troisième petit-fils nous a rejoins le 8 février. Il s'appelle Paul et il est le fils d'Apolline et Auguste. D'ailleurs leur fille ainée est devenue une jolie adolescente. Elle a fêté également ses treize ans le 19 mars.

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    Puis les mois ont passé. La gamine, Madeleine de son prénom, est une enfant qui ne fait pas de bruit. Elle s'isolait souvent, et ne s'attachait pas à nous. Elle ne cherchait pas à nous parler, et je te l'avoue, nous n'allions pas vers elle non plus. Marcel avait tendance à aller vers elle, mais cela provoquait la colère de Georges. Après quelques corrections, mon petit-fils a abandonné l'idée de se lier d'amitié avec la petite. Il est désormais très proche de son cousin André ... ils ont le même âge. Ils sont adorables mais je ne sais pas. Quand André se moque de la peau de la gamine, et que j'entends rire Marcel, bien que je ne lie aucun sentiment pour elle, je ne peux que me sentir hérissait par leur comportement. Le pire c'est quand j'entends Georges les encourager ... Elle n'est qu'une enfant sans défense ...

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    La présence de Madeleine fut donc difficile durant de longs mois. Puis, Augustine est venue me voir au mois de juin. Assise sur mon lit, elle m'a regardé, les yeux pleins d'espoirs. Elle m'a alors dit que Madeleine et elle s'entendaient plutôt bien. Qu'elle avait réussi à tisser un lien avec la petite fille et que Madeleine semblait aimer être en sa compagnie. Que depuis le début d'année, elle avait commencé un travail en tant que fleuriste et qu'elle se sentait capable de vivre ailleurs que dans la demeure familiale. Qu'âgée de vingt-quatre ans, elle était perçu aux yeux des hommes de "vieille fille" et que le mariage ne semblait pas être pour elle. Elle semblait en avoir fait le deuil et que du coup, elle aimerait élever la petite Madeleine. Je t'avoue mon cher journal qu'à ce moment là, j'étais persuadé que l'idée était parfaite. Enfin, Madeleine quitterait le foyer mais elle irait chez un de mes enfants. Ainsi, malgré tout, je la saurai heureuse. Et Honorine pourra continuer de la voir.

    Puis en y réfléchissant, je réalise aujourd'hui que ... Augustine se sacrifie pour elle. Le mariage à vingt-quatre ans reste possible malgré tout ... Mais qui épouserait une femme ayant en charge une gamine de couleur ? Quel homme pourrait vouloir faire la cour à ma pauvre fille ? Jamais elle ne pourra être heureuse avec un mari, et fonder sa propre famille. Pourtant, Augustine semble ravie de prendre Madeleine alors ... C'est chose faîte. Fin août, avec les économies de ma fille et la vente de mes produits, j'ai pu lui acheté une petite maison pas trop loin, où elles pourront vivre correctement....

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    Les filles installaient, la vie a repris son cours. Chacun à ses occupations. Marcel âgé de sept ans, s'intéresse de plus en plus à ce que je fais. Il me suit souvent ... j'aime ça. Cela me rappelle ma jeunesse lorsque mes enfants étaient près de moi. Et mes petit-enfants grandissent aussi si vite ... cela me fait peur. Mireille, la seconde fille de Honorine et Emile est déjà une jeune femme de dix-huit ans ... le crois-tu ? Heureusement, il y a encore des petits enfant à venir ... Joséphine, la jeune mariée, est enceinte. 

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     Ce qui me rassure, c'est que du coté de mes amis, les gosses grandissent aussi. La roue tourne et c'est ainsi ... Récemment, j'ai croisé Jacques l'uns des fils de Victor. C'est un beau jeune homme de vingt-huit ans marquait lui aussi par la guerre. Il m'a avoué ne plus être le même depuis son retour... C'est malheureux tout ces jeunes hommes blessé à jamais. Sa petite soeur Charlotte est devenue aussi une jeune femme de dix-huit ans. Tout comme le fils aîné d'Adélaïde, Henri. La naissance de celui-ci me semble être hier ....

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    En parlant de jeune gens marquaient par la guerre .... George me désespère. Je ne sais plus quoi penser de lui ... ses humeurs, ses colères, ses crises de colères sans réelles raisons me font peur. Ses changements d'humeurs radicales ... passer du rire aux larmes, de la colère à la tristesse en une fraction de seconde ... Marcel m'a confié ne pas être à l'aise lorsqu'il est seul avec son père ... il a peur de son père. Tout comme Justine qui reconnaît ne plus avoir de réel moment de douceur avec lui ... elle le compare à une bête devant satisfaire un besoin. 

    J'espère tellement que tout ça ne va pas dégénérer ... mon âge avançant ... j'aimerai tellement que la paix règne dans le foyer le jour de mon heure venue ...

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