Le 2 octobre 1880,

Cher Journal, 

Aujourd'hui, je n'ai que moi-même sur qui compter pour faire vivre décemment ma jeune épouse, Phélomène. Il n'y a qu'à toi que je peux l'avouer ... mais j'ai peur. Tellement peur de ne pas être à la hauteur. Evidemment, je sais que Phélomène se contentera de ce que je lui donnerai parce qu'elle fait partie de ces personnes qui aime inconditionnellement.

Surement que je fais moi aussi parti de ces personnes là .... ? Où suis-je devenu complètement fou ? Comment appellerais-tu un jeune homme de 19 ans, bien-né dans une famille respectable et influente de la ville, qui décide de quitter fortune, réputation et fiancée pour vivre une vie incertaine auprès de celle qu'il aime ? Cet avenir me fait peur mais je ne regrette rien.

Je ne regrette pas d'avoir écrit cette lettre d'adieu pour mes parents, ni d'avoir rompu mes fiançailles avec cette chère jeune fille si bien-née, je ne regrette pas non plus d'avoir vendu ce magnifique violon qui avait appartenu à mon grand-père mais qui ne me servait absolument pas. D'avoir enlevé celle qui allait devenir mon épouse à ses bourreaux depuis tant d'années.... Et lui promettre une vie heureuse à mes cotés. Mais ce que je regrette le moins, c'est de m'être marié à la hâte dans un village où nous ne connaissions personnes. Devenir un inconnu aux yeux des passants était une grande première pour moi ...

Moi, seul et unique héritier de la famille richissime De Lahaute. Me voilà ... ici. J'ai bien envie de m'arrêter là ... un village bien sympathique qui s'appelle Henford-on-Bagley. Je sens dans les yeux de Phélomène qu'elle en a assez de vadrouiller ... et j'ai vu qu'elle semblait beaucoup aimer cet endroit .... Alors, ce soir ... ce sera notre dernière nuit sous les étoiles ... Demain, je vais me renseigner pour savoir si je ne pourrais pas nous offrir une petite maison. Notre maison, notre foyer.

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1881 ==>